Vous avez un terrain à cultiver ou désireriez-vous en avoir un ?
Vous jardinez déjà ou aimeriez-vous jardiner ?
Savez-vous que 17 millions de Français jardinent ?
17 millions, c’est beaucoup, d’autant plus que c’est contraignant le jardinage, c’est fatiguant. Il faut travailler
presque tous les jours. Et puis, c’est très aléatoire parce qu’un coup de gel, un coup de chaud, un coup de sec, un
orage de grêle et on peut perdre très vite la somme de tous ces efforts.
Et puis, les plantations que l’on fait ne donnent pas toujours exactement comme on espérait. Bref, ça fait
beaucoup de soucis.
On peut y faire pousser des salades. C’est merveilleux, les salades, comme les tomates, courgettes et autres
aubergines et potirons. Des fleurs aussi.
La culture, celle des sols, c’est donc souvent une aventure, mais aussi du calme, de la sérénité, de la tranquillité.
Alors, le jardin devient l’occasion de se retrouver simplement face à soi-même, loin du tourbillon de la vie.
Et nous voudrions vous donner, en ce début d’année encore un peu hésitant, l’image de ce que nous apporte un
jardin.
Le jardin, un îlot de nature au service de l’homme.
A l’image de la condition humaine, le jardin a tout d’abord pour objectif de modifier la nature, afin de la mettre
au service de l’homme. La nature sauvage est transformée en jardin, pour domestiquer la nature, nourrir les
hommes et les protéger.
Le jardin est l’une de ces formes qui transitent à travers l’histoire car il est, littéralement, une inscription, aussi
précise qu’un dessin magique : il trace le travail du sol à la surface du globe terrestre, héritant de toute la
tradition des corps à corps du combat avec la terre rebelle pour l’amadouer, la féconder, l’asservir peut-être.
Chaque jardin implanté et cultivé décrit les limites d’un territoire défini, d’un domaine réservé et clos dans
lequel, et par lequel, l’esprit a réussi à comprendre et à dominer les lois de l’univers, du grand univers et de
notre univers personnel.
Le jardin, un îlot de réflexion et d’apaisement.
Depuis l’Antiquité, le jardin invite à la fois à la réflexion et à la contemplation.
En effet, le jardin travaille le corps et l’esprit. Il est un véritable éloge de la lenteur, de la persévérance et de la
patience. Comme un jardin, la pensée et la réflexion s’exercent peu à peu, et il faut du temps pour se forger son
propre libre-arbitre.
C’est dans des jardins, le long d’une allée ombragée de cyprès, que les philosophes grecs, Platon, Aristote,
Epicure, dispensaient leurs enseignements et avaient fait inscrire « Etranger, votre temps sera plaisant ici. Ici le
plaisir est le bien suprême ».
Sagesse d’une vie à l’abri des tempêtes du monde, cet apaisement commande une clôture, presque un cloître, et
le mot a la même origine.
À mi-chemin des deux dangers de la nature et de la société, le jardin offre l’asile souhaité.
Dans un monde où la vitesse est reine, le jardin nous oblige à ralentir, à revenir aux cycles naturels, lents et
longs. Les arbres sont nés avant nous et nous survivront. Les plantations méritent attention et patience, de se
recentrer sur le temps long et non plus d’exiger l’instantané.
Le jardin devient en lui-même une thérapie. C’est pour cela qu’il ne faut jamais cesser de le penser.
Le jardin, pour la plupart d’entre nous, évoque une forme d’apaisement, de calme et de sérénité.
Jardinier du dimanche ou bien véritable connaisseur, chacun a déjà fait l’expérience du contact avec les
végétaux et la terre, comme un soudain retour aux sources. Les citadins jouissent quant à eux des jardins
publics et des espaces verts, ou bien recréent sur leurs balcons un espace de verdure.
Le jardin, c’est se cultiver soi-même
Un espace protégé, un espace refuge à l’écart de la vanité du monde et de ses sirènes décevantes ou éphémères.
Souvenez-vous, au XVIIIème siècle, notre Voltaire national nous invitait à la fin de son conte philosophique
Candide à « cultiver notre jardin », à ne pas perdre notre temps, à courir derrière des mirages.
Désirer être en bonne santé, ne pas souffrir, avoir de quoi se nourrir, mais surtout être entouré de ses amis,
pouvoir passer du temps à discuter avec eux. Autrement dit, cela suppose de défricher, de biner, de tailler nos
propres désirs dans notre jardin intérieur pour ne garder que ceux qui pourront donner du fruit ou de jolies
fleurs et pour se débarrasser des herbes mauvaises qui grimpent partout et qui étouffent tout le reste.
Cultiver son jardin donc, c’est se cultiver soi-même. Entrer dans un nouveau rapport à soi. Travailler sur soi et
donc développer, se tailler soi-même. De même qu’on peut tailler un arbre ou donner une forme à un buisson,
on peut se tailler en donnant certaines formes à nos désirs et à notre manière de voir la vie.
Et c’est aussi apprendre à faire face aux aléas. Ce coup de chaud, ce coup de gel. Ces orages, c’est-à-dire les
maladies, les ruptures amicales, la mort. A force de préparation, de patience et de soin.
Alors, c’est beau parce que c’est entretenir au fond la conviction que notre bonheur dépend de nous et non pas
d’un destin où tout serait déjà écrit.
Le jardin, c’est aussi les autres.
Le philosophe soutient que le jardinier cultivateur qui forme avec la terre une sorte de petite communauté
développe aussi cet art de s’associer avec les autres
C’est le cas des expériences de « jardins partagés », dans lesquels chaque individu se voit accorder une parcelle,
mais coopère dans un ensemble plus vaste qui permet à chacun de prendre part à une communauté à laquelle ils
se sentent appartenir
Le jardin, c’est la plus petite parcelle du monde et puis c’est la totalité du monde.
Qu’il se trouve à la campagne ou à la ville, le phénomène du jardin communautaire exprime une forme de
redécouverte des vertus citoyennes qui accompagnent une redécouverte d’un rapport juste à la terre.
Plus l’agriculture est partagée, moins le temps nécessaire pour la production de la subsistance est grand par
individu.
Après tout, le jardin est une formidable invitation au voyage. L’herbe est toujours plus verte ailleurs, nous dit-
on. Certainement ! Chaque jardin embaume de senteurs et dépose en nous un peu de pollen; donnant envie de
découvrir de nouveaux jardins.
Et, dans nos grandes villes, les jardins ont vocation à reproduire la nature, à récréer des parcelles de verdure, à
réintroduire le végétal dans les paysages urbains cimentés. Au-delà de l’acte écologique ou environnemental, la
prise de conscience de la nécessité vitale des arbres fait réfléchir.
C’est tout le paradoxe de la condition humaine qui détruit et recrée tout à la fois, dans un cycle éternel qui
s’accélère.
Et voilà bien le paradoxe. Le jardin est clos, du moins limité.
En guise de vœux, Les jardiniers du Var vous offrent cet extrait de l’ouvrage de Serge REZVANI « Pour une
philosophie du jardin » :
« Évoquer le jardin, c’est descendre à l’être des choses, privilégier le détail sur l’ensemble, la fleur sur le massif,
aller au cœur de la fleur, avec ses étamines, son pollen d’or fin, les délicates nervures de ses pétales retroussés,
alors qu’une abeille aux besaces alourdies de cet or, pareille à un minuscule hélicoptère bourdonnant, descend
d’un vol vertical se reposer quelques secondes sur la plage colorée du calice qui semble s’entrouvrir exprès
pour elle ».